XLIX. — La fonderie, la fonte et les objets en
fonte.
N'ignorons pas l'origine et
l'histoire des objets dont nous nous servons.
—
Regarde ! regarde ! s'écria André : on ouvre en ce
moment le réservoir du haut fourneau. Voilà le fer fondu qui coule
dans des rigoles pratiquées sur le sol.
— Oh ! fit Julien en
frappant dans ses mains d'admiration, on dirait un ruisseau de feu qui coule.
Oh ! oh ! comme il y en a ! Quel brasier ! Quand je pense
que c'est là du fer !
— Ce n'est pas du fer pur,
Julien, dit M. Gertal ; c'est du fer encore mêlé de
charbon et qu'on appelle la fonte. Tu
en as vu bien souvent : rappelle-toi les poêles de fonte et les
marmites.
— Qui se brisent quand on
les laisse tomber, interrompit le petit Julien ; je ne le sais que
trop !
— C'est là
justement le défaut de la fonte : elle se brise trop aisément
et n'a pas la solidité du fer pur. Pour changer cette fonte que tu vois
en un fer pur, il faudra la remettre dans d'autres fourneaux, puis la
marteler. Mais on peut employer de la
fonte, telle que tu la vois ici, à la fabrication d'une foule d'objets
pour lesquels elle suffit.
Nos trois amis
continuèrent leur promenade à travers la fonderie. Partout la
fonte en fusion coulait dans les rigoles ou tombait dans de grands vases, et des
ouvriers la versaient ensuite dans les moules : en se refroidissant, elle
prenait la forme qu'on voulait lui donner : ici, on fondait des marmites,
des chenets, des plaques pour l'âtre des cheminées ;
là, des corps de pompe, ailleurs des balustrades et des grilles.
OUVRIERS COULANT LA FONTE DANS
UN MOULE. — Cet énorme vase en tôle qui est suspendu à
une
grue, et que
manient à grand'peine deux ouvriers, peut contenir des milliers de
kilogrammes de métal fondu. On verse le métal dans une ouverture
qui communique avec un moule creux placé sous la terre. Ainsi se fondent
les cloches, les canons et tous les gros objets en fer ou en fonte.
— C'est d'une façon
semblable, dit M. Gertal, mais avec un mélange ou
alliage de plusieurs métaux
qu'on fond les canons, les cloches d'airain, les statues de bronze.
— Que je suis content, dit
Julien, de savoir comment se fabriquent toutes ces choses et d'en avoir vu faire
sous mes yeux ! Mais, ajouta-t-il en soupirant, que de peine tout cela
coûte ! quel mal pour avoir seulement un pauvre morceau de fer !
Quand je pense que les petits clous qui sont sous la semelle de mes souliers ont
été tirés d'abord de la terre, puis fondus dans les hauts
fourneaux, puis martelés et façonnés ! Que c'est
étonnant tout de même, monsieur Gertal !
— Oui, Julien,
répondit le patron. On ne se figure pas combien les moindre objets dont
nous nous servons ont coûté de travail et même de science,
car les ingénieurs qui dirigent les ouvriers dans ces usines ont dû
faire de longues et pénibles études, pour savoir se
reconnaître au milieu de toutes ces inventions et de ces machines si
compliquées. Que serait la force de l'homme sans la science ?