Titre Précedent Suivant Sommaire Index | XCIII. – Les grands hommes du Maine, de l'Anjou et de la Touraine. – Le chirurgien Ambroise Paré. – Le sculpteur David. – Le savant philosophe Descartes.

XCIII. – Les grands hommes du Maine, de l'Anjou et de la Touraine. – Le chirurgien Ambroise Paré. – Le sculpteur David. – Le savant philosophe Descartes.

« Plus on avance dans la science, plus on s'aperçoit combien on ignore encore de choses, et plus on devient modeste. » DESCARTES.
Le lendemain, Julien n'eut pas le plaisir de causer avec son ami Guillaume ; la mer était redevenue mauvaise et le vieux pilote était trop occupé pour faire la conversation.
– Assieds-toi tranquillement, mon Julien, dit André au petit garçon, cela vaudra mieux que de courir sur le pont pour embarrasser la manoeuvre et risquer d'être emporté par les lames, qui sont fortes.
– Oui, André, répondit l'enfant, je vais m'asseoir dans un petit coin et m'amuser à lire tout seul pour ne déranger personne. Et Julien, tirant de sa poche son livre, qui ne le quittait jamais, l'ouvrit à la page où il en était resté la veille. Il lut ce qui suit :
I. Il y a, à l'est de la Bretagne, deux fertiles provinces qui semblent la continuer, et qui sont arrosées aussi par la Loire ou ses affluents : c'est le Maine et l'Anjou.
Le Maine produit des chanvres et des lins, dont on fait dans le pays des toiles renommées. Les boeufs et les volailles du Mans sont d'excellente race ; le pays est boisé, et le gibier y abonde.
C'est dans le Maine, près de Laval, que naquit le célèbre chirurgien Ambroise Paré. Il jouait un jour avec de jeunes villageois de son âge, et tous ces enfants couraient et sautaient ensemble. Tout d'un coup, l'un d'eux tomba et ne put se relever. Il s'était fait une grave blessure à la tête, et le sang coulait en abondance. Tous ses camarades, sottement effrayés à la vue du sang et le croyant mort, se mettent à fuir en criant. Seul le petit Ambroise, à la fois courageux et plus compatissant, s'approche de son camarade, lui lave la plaie, la bande avec son mouchoir ; puis, comme l'enfant pouvait à peine se remuer, il le charge sur ses épaules et le transporte chez ses parents.
Cette présence d'esprit et cette fermeté de caractère furent bientôt connues dans le pays. Un chirurgien de l'endroit en entendit parler, fit venir près de lui le petit Ambroise, et, voyant qu'il ne demandait qu'à s'instruire, le prit chez lui comme aide.
A partir de ce moment, Ambroise Paré commença à étudier la chirurgie, qu'il renouvela plus tard par ses découvertes. Il devint médecin du roi. Toute sa vie est un long exemple de travail, de science, de dévouement et de modestie.
Quand la peste éclata à Paris, le roi quitta la ville, mais Ambroise Paré, quoiqu'il fût médecin du roi, refusa de l'accompagner et voulut rester à Paris pour soigner les malades. Il s'exposa à tous les dangers et parvint ainsi à sauver bien des malheureux en risquant lui-même sa vie.
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AMBROISE PARÉ, né près de Laval vers 1517.
Les soldats l'appelaient leur bon père. Un jour, dans une campagne, il fut fait prisonnier par les Espagnols. On ne l'avait point reconnu, melé à la foule des captifs, d'autant que ce grand homme avait une modestie égale à son génie, mais un de ses compagnons vient à tomber malade : il le soigne, il le sauve. On reconnaît aussitôt Ambroise et on lui rend immédiatement la liberté.
Ambroise Paré est mort à Paris en 1590. Il fut le chirurgien des rois Henri II, François II, Charles IX et Henri III.
La ville de Laval lui a élevé une statue en bronze sculptée par David d'Angers.
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ARDOISIERS D'ANGERS. – Quand les ardoises ont été arrachées de la carrière par gros blocs, on les fend au moyen de coins et de pics : on obtient ainsi des feuilles de plus en plus minces. De nos jours, on a inventé une machine au moyen de laquelle on fend les ardoises avec rapidité.
II. L'Anjou est plus fertile encore que le Maine ; les vents tièdes de l'Océan rendent le climat assez doux, mais humide. On y trouve en pleine terre, dans des pépinières abritées, des grenadiers et des magnolias. La campagne produit de bons vins, surtout ceux de Saumur. Angers, ville de 82 400 âmes, a une importante école d'arts et métiers, et ses environs renferment de nombreuses carrières d'ardoises. A Saumur se trouve une grande école de cavalerie, où l'on instruit les officiers et les soldats.
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ÉCOLE DE CAVALERIE DE SAUMUR. – Notre grande école de cavalerie est située à Saumur (Maine-et-Loire). Là on prépare les officiers qui doivent servir dans la cavalerie. Outre les connaissances scientifiques, il faut aussi qu'un cavalier sache sauter à cheval sans étrier, sauter d'un cheval sur l'autre si le sien vient à être tué, etc.
C'est à Angers que naquit, en 1789, un des plus grands sculpteurs de notre siècle, David, dont nous avons déjà prononcé souvent le nom à propos des statues qu'il a sculptées. Il avait pour père un simple ouvrier très pauvre, qui sculptait des objets en vois, tables, fauteuils, coffres, chaires d'église. Le jeune David, quand il n'était encore qu'écolier, se fit tellement distinguer par son travail intelligent, que sa ville natale lui servit une petite pension pour lui permettre d'aller étudier à Paris. Il partit, n'ayant que quinze francs dans sa poche.
Quelques temps après, il obtint le grand prix de sculpture et devint célèbre.
David d'Angers avait un amour ardent pour la patrie française, et c'est cet amour qui inspira son génie : il consacra son art et sa vie à faire les statues de la plupart des grands hommes qui ont illustré la France.
III. Avant de traverser l'Anjou et la Bretagne pour se jeter dans la mer, près de Nantes, la Loire arrose un pays couvert comme l'Anjou de verdoyantes prairies, de maisons de campagne et de châteaux : c'est la Touraine, qu'on a surnommée, à cause de sa fertilité, le Jardin de la France.
Près de Tours, ville de 64 700 âmes, placée au bord de la Loire dans une situation admirable, naquit un des plus grands savants du monde, Descartes, dont la statue s'élève à Tours.
Le jeune Descartes, à seize ans, avait déjà étudié toutes les sciences, et il ne tarda pas à s'illustrer par une longue série de découvertes dans les sciences les plus diverses : mathématiques, physique, astronomie, philosophie.
Descartes avait cinquante-trois ans lorsque la reine Christine de Suède, qui admirait passionnément son génie et qui avait elle-même le plus grand goût pour les sciences, le supplia de venir dans son palais, d'être son maître et son conseiller, d'y continuer ses expériences avec tous les trésors qui seraient mis à sa disposition. Descartes refusa d'abord, puis céda aux instances de la reine. Il vint en Suède ; bientôt ce froid climat le rendit malade et causa sa mort prématurée. Ses restes furent rapportés à Paris.
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LA STATUE DE DESCARTES ET LE PONT SUR LA LOIRE A TOURS. – Le savant Descartes naquit à la Haye, près de Tours (Indre-et-Loire), en 1596, et mourut à Stockholm en 1650.