Titre Précedent Suivant Sommaire Index | LXXI. — La guérison de Julien. — Le chemin de fer. — Grenoble et les Alpes du Dauphiné.

LXXI. — La guérison de Julien. — Le chemin de fer. — Grenoble et les Alpes du Dauphiné.

La maladie nous fait mieux sentir combien les nôtres nous aiment, en nous montrant le dévouement dont ils sont capables.
Heureusement les prévisions du médecin se réalisèrent. Quand Julien s'éveilla, il était beaucoup mieux : le délire avait disparu et la fièvre était presque tombée.
Deux jours de repos achevèrent de le remettre.
Le médecin permit alors aux deux jeunes Lorrains de partir pour Marseille, mais il prit André à part et lui recommanda de ne pas laisser le petit garçon se fatiguer.
— L'entorse du pied, dit-il, ne permettra pas à votre frère de marcher facilement avant un mois. D'ici là, il faut distraire cet enfant et ne pas le laisser s'attrister tout seul, de crainte que la fièvre nerveuse dont il vient d'avoir un accès ne reparaisse.
André remercia le médecin de ses bons avis ; il ne savait comment lui montrer sa reconnaissance, car le docteur, loin de vouloir être payé, avait fait cadeau à son petit malade d'une pantoufle de voyage pour le pied blessé.
La gaîté de Julien revenait peu à peu : il voulut aider lui-même, de son lit, à faire le paquet de voyage, et il n'oublia pas de mettre dans sa poche son livre sur les grands hommes, afin, disait-il, de bien s'amuser à lire dans le chemin de fer.
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GARE DE CHEMIN DE FER. — Les gares sont des abris sous lesquels les trains s'arrêtent : c'est là que descendent et montent les voyageurs, c'est là qu'on charge et décharge les marchandises. Les gares des grandes villes, surtout celles de Paris, sont de véritables monuments.
Lorsque les préparatifs furent achevés, André régla partout les dépenses qu'il avait faites ; puis il prit le petit Julien dans ses bras. Julien portait de sa main valide le paquet de voyage attaché au fameux parapluie. Quoique bien embarrassés ainsi, les deux enfants se rendirent néanmoins à la gare, qui n'était éloignée que d'un quart d'heure.
Une demi-heure après, les deux enfants étaient assis l'un près de l'autre dans un wagon de 3e classe. Au bout d'un instant la locomotive siffla et le train partit à toute vitesse.
Julien n'avait encore jamais voyagé en chemin de fer : il s'amusa beaucoup la première heure, il regardait sans cesse par la portière, émerveillé d'aller si rapidement et de voir les arbres de la route qui semblaient courir comme le vent.
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GRENOBLE. – Cette ville d'environ 69 000 âmes est divisée en deux parties par l'Isère sur laquelle elle a de magnifiques quais. Elle est renommée, ainsi que Valence et Vienne, pour ses fabriques de gants et de peaux délicates. Grenoble est le siège d'une académie et d'une université. Les industries électriques y sont très développées.
Derrière eux, les belles cimes des Alpes du Dauphiné montraient leurs têtes blanches de neige que le soleil faisait reluire. – Vois-tu, Julien, cette chaîne de montagnes que nous laissons derrière nous ? C'est par là qu'est Grenoble, la capitale du Dauphiné.
– Oh ! que ce doit être beau, Grenoble, si c'est au milieu des monts !
– J'ai lu, en effet, dans ma géographie que c'est une des villes de France qui ont les plus belles vues sur les montagnes. Elle est dans la vallée du Grévisaudan, dominée par des forts qui la rendent presque imprenable.
Julien, malgré son pied malade, ne pouvait s'empêcher de se traîner sans cesse du banc à la portière. Enfin, pour se reposer, il ouvrit son livre d'histoires.
– André, dit-il, voilà longtemps que je n'ai lu la vie des grands hommes de la France ; puisque nous passons en ce moment dans le Dauphiné, je veux connaître les grands hommes de cette province.
André s'approcha de Julien, et tous les deux tenant le livre d'une main lurent tout bas la même histoire, celle de Bayard, le chevalier sans peur et sans reproche.