Titre Précedent Suivant Sommaire Index | CIII. – Une surprise après l'arrivée à Dunkerque. – Les quatre caisses. – Utilité des assurances.

CIII. – Une surprise après l'arrivée à Dunkerque. – Les quatre caisses. – Utilité des assurances.

En s'entendant les uns avec les autres et en se cotisant, on parvient de notre temps à réparer des malheurs qui étaient autrefois irréparables.
Le paquebot arriva rapidement à Dunkerque. Ce port, le plus fréquenté du département du Nord, tire son nom des dunes de sable près desquelles la ville est bâtie. C'est, avec Boulogne et Calais, un centre important pour la pêche des harengs et des sardines.
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LES DUNES DE DUNKERQUE. – On appelle dunes des collines de sable qui se sont formées sur les bords de l'Océan ou de la Manche. Elles sont stériles et souvent habitées par des renards. On arrête les dunes, dans le Nord, en y plantant une sorte de jonc marin, et dans les Landes en y plantant des pins maritimes. Les plantations ou semis faits sur les dunes sont exemptés d'impots pendant trente ans.
Frantz désirait se rendre au plus vite en Alsace-Lorraine avec ses neveux sans rien dépenser ; il songea à se procurer de l'occupation sur un des bateaux qui font le service des canaux du Nord et qui, regagnant le canal de la Marne au Rhin, passent tout près de Phalsbourg.
On parcourut la ville animée de Dunkerque ; on passa devant la statue de Jean Bart que David a sculptée, et Julien admira l'air résolu du célèbre marin.
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LA PÊCHE DU HARENG. – Le hareng est un joli poisson glauque sur le dos et blanc sous le ventre. Chaque année, au mois de mars, les harengs descendent des mers du Nord par bancs immenses et voyagent le long de nos côtes. C'est alors que les pêcheurs vont jeter dans l'eau leurs grands filets qu'ils retirent chargés de harengs. Cette pêche est aussi importante que celle de la morue.
L'oncle Frantz ne trouva pas du premier coup ce qu'il désirait. Ce fut seulement après deux jours de recherches, bien des peines et bien des tracas, qu'il obtint de l'ouvrage à bord d'un bateau. Encore ne lui promit-on d'autre salaire que leur nourriture à tous les trois.
Nos amis s'en revenaient donc la tête basse, le front soucieux, songeant qu'il allait falloir entamer leur petite réserve d'argent pour s'acheter des vêtements de rechange ; et ils étaient si tristes qu'ils marchaient sans rien se dire, préoccupés de leurs réflexions.
– Eh bien, s'écria Guillaume qui les attendait sur le seuil de la porte, arrivez donc : il y a du nouveau qui vous attend.
Julien, en voyant la figure radieuse du brave pilote, devina vite que les nouvelles étaient bonnes ; il s'élança à sa suite de toutes ses petites jambes, et on monta quatre à quatre l'escalier de la mansarde qu'on avait louée en arrivant.
Quand la porte fut ouverte, Julien demeura bien surpris. Il aperçut au beau milieu de la mansarde quatre caisses de voyage portant chacune le nom de l'un de nos quatre voyageurs. Julien, naturellement, s'empressa d'ouvrir celle qui portait son nom, et il fit un saut d'admiration en voyant dans le tiroir de la caisse de bonnes chemises à sa taille, des bas, des souliers neufs, un chapeau en toile cirée et une paire de pantalons en bon drap.
– Mais, monsieur Guillaume, dit l'enfant en déployant toutes ces richesses, est-ce que c'est possible que ce soit pour moi, tout cela ! D'où vient cette belle caisse ? Et André qui en a autant ! et mon oncle aussi, et vous aussi ! Qu'est-ce que cela veut dire ?
– Petit Julien, répondit le pilote Guillaume, ravi de la bonne surprise qui épanouissait tous les visages, c'est le cadeau d'adieu de notre capitaine. Il a fait dresser avec moi, comme la loi l'y obligeait, le procès-verbal du naufrage du navire : le Poitou était assuré avec toute sa cargaison et le capitaine ne perdra rien : il a trouvé juste que nous ne perdions rien aussi, et il nous envoie ces vêtements en échange de ceux qui ont coulé avec le navire. En même temps, il a ajouté le paiement promis à chacun de nous pour la traversée. Volden, voici tes cinquante francs ; André, en voici trente, et toi, Julien, voici un carton d'écolier tout neuf pour te récompenser d'avoir été courageux en mer comme un petit homme.
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JEAN BART, né à Dunkerque en 1651., mourut en 1702. Fils d'un simple pêcheur, il devint l'un de nos plus illustres marins. Un capitaine anglais l'invita un jour à dîner, il se rendit sans défiance sur son navire : mais c'était une trahison : à la fin du dîner les matelots anglais se jetèrent sur Jean Bart pour le faire prisonnier. Celui-ci, avec un sang froid admirable, se dégageant brusquement, courut vers un tonneau de poudre, en approcha une mèche allumée qu'il avait saisie et cria aux Anglais d'une voix tonnante : « Si vous faites un pas vers moi, je fais sauter le navire et nous avec. » Les Anglais interdits s'écartent, les marins de Jean Bart ont le temps d'arriver, s'emparent du navire, et Jean Bart triomphant ramène à Dunkerque les Anglais prisonniers sur leur propre vaisseau.
Julien ne se possédait pas d'aise. Cette caisse à son adresse, c'était le premier meuble qu'il eût possédé.
– Mon oncle, disait-il en sautant de plaisir, voyez donc, nous avons maintenant un mobilier : c'est comme si nous possédions chacun une armoire !
Tout d'un coup, il s'interrompit pour pousser une nouvelle exclamation de surprise :
– Quel bonheur ! dit-il, jusqu'à mon joli parapluie que M. Gertal m'avait donné et que j'avais tant de regret d'avoir perdu ! Eh bien, le capitaine en a mis un au fond de la caisse, et il est tout pareil, regarde, André.
– Je m'imagine, dit l'oncle Frantz en tendant la main avec émotion à Guillaume, qu'il y a quelqu'un qui a sans doute aidé la mémoire du capitaine.
– Mon vieil ami, dit Guillaume, j'étais chargé de faire l'inventaire complet ; j'ai taché de ne rien oublier.
Ce soir-là, nos quatre amis dînèrent bien contents. Après dîner on alla remercier le capitaine, et, chemin faisant, Julien ne put s'empêcher de dire qu'il trouvait que les assurances sont une bien bonne chose.
– Oui certes, petit Julien, répondit Guillaume. En donnant aux compagnies d'assurances une faible somme chaque année, on se trouve protégé autant que faire se peut contre les malheurs de toute sorte. Je me suis déjà dit qu'en arrivant chez moi la première chose que je vais faire, ce sera d'assurer contre l'incendie le petit bien dont nous avons hérité et d'assurer contre la grêle mes récoltes de chaque année.
– L'homme sage n'attend point que le malheur ait frappé à sa porte pour lui chercher un remède.