Titre Précedent Suivant Sommaire Index | LXIV. —Deux hommes illustres de Lyon. — L'ouvrier Jacquard. Le botaniste Bernard de Jussieu. L'union dans la famille. — Le cèdre du Jardin des Plantes. |
LXIV. —Deux hommes illustres de Lyon. —
L'ouvrier Jacquard. Le botaniste Bernard de Jussieu. L'union dans la famille.
— Le cèdre du Jardin des Plantes.
Ce que la patrie admire dans
ses grands hommes, ce n'est pas seulement leur génie, c'est encore leur
travail et leur vertu.
Quand on
eut quitté Lyon et ses dernière maisons, tandis que la voiture
courait à travers les campagnes fertiles et les beaux vignobles du
Lyonnais, Julien prit son livre, et, profitant de la première côte
que Pierrot monta au pas, fit la lecture à haute voix.
I. A Lyon est né un homme qu'on a proposé
depuis longtemps comme modèle à tous les travailleurs. Jacquard
était fils d'un pauvre ouvrier tisseur et d'une ouvrière en soie.
Dès l'enfance, il connut par lui-même les souffrances que les
ouvriers de cette époque avaient à endurer pour tisser la soie. La
loi d'alors permettait d'employer les enfants aux travaux les plus
fatiguants : ils y devenaient aveugles, bossus, bancals, et mouraient de
bonne heure.
JACQUARD,
né à Lyon en 1752, mort en 1834 à Oullins
(Rhône).
Le jeune Jacquard, mis à
ce dur métier, tomba lui-même malade. Ses parents, pour lui sauver
la vie, durent lui donner une autre occupation ; ils le placèrent chez un
relieur, et ce fut un grand bonheur pour l'enfant, car, une fois dans l'atelier
de reliure, il ne se borna pas à cartonner les livres qu'on lui
apportait : à ses moments de loisir, il lisait ces livres, et il
acquit ainsi l'instruction élémentaire qu'on n'avait pu lui
donner.
Une fois instruit, le studieux ouvrier sentit
s'éveiller en lui le goût de la mécanique, et il
conçut l'idée d'une machine qui accomplirait à elle seule
le pénible travail qu'il avait lui-même accompli jadis. Mais de
tristes événements vinrent interrompre ses recherches :
c'était le moment des guerres de la Révolution, où les
citoyens combattaient les uns contre les autres en même temps que contre
les ennemis de la France. Il se fit soldat et alla combattre, lui aussi, pour la
patrie.
Pendant qu'il était sur le champ de bataille, son
fils unique mourut à Lyon. Sa femme était dans la misère,
tressant, pour vivre, des chapeaux de paille. C'est alors qu'il revint de
l'armée, et ce fut au milieu de cette tristesse et de cette misère
générale qu'il finit par construire la machine à laquelle
il a donné son nom.
Mais que de temps il fallut pour que cette merveilleuse
machine fût estimée à son vrai prix ! Les ouvriers
mêmes dont elle devait soulager le travail la voyaient de mauvais oeil. Un
jour, on la brisa sur la place publique, et le grand homme qui l'avait
inventée eut lui-même à souffrir les mauvais traitements
d'ouvriers ignorants.
Enfin, au bout de douze ans d'efforts, son métier
fut généralement adopté et fit la richesse de Lyon.
Les ouvriers, qui craignaient que la machine nouvelle ne
leur nuisît et ne leur enlevât du travail, virent, au contraire,
leur nombre augmenter chaque jour : il y a maintenant à Lyon plus de
cent mille ouvriers en soieries. Et partout on a adopté le métier
de Jacquard, en Allemagne, en Angleterre, en Italie, en Amérique et
jusqu'en Chine. Chaque ville manufacturière invitait Jacquard à
venir organiser chez elle les ateliers de tissage. La ville de Manchester en
Angleterre lui offrit même dans ce but beaucoup d'argent ; mais
Jacquard, voulant conserver toutes ses forces et tout son travail pour sa patrie
bien-aimée, refusa.
La ville de Lyon, reconnaissante envers cet homme qui a
fait sa prospérité, lui a élevé une statue sur une
de ses places.
II. Parmi les hommes célèbres que Lyon a
produits, on peut citer encore BERNARD DE JUSSIEU, né dans les
dernières années du dix-septième siècle. Il s'adonna
à l'étude des plantes ; cette étude s'appelle la
botanique. C'est Bernard de Jussieu qui
trouva le moyen de bien classer les milliers de plantes que produit la nature,
de les distinguer les unes des autres et de savoir les reconnaître. Il
avait tant travaillé que, sur la fin de sa vie, il devint presque
aveugle ; il ne pouvait plus ni lire, ni écrire, ni surtout
distinguer ses chères plantes ; mais son neveu, auquel il avait
communiqué son savoir, l'aida de ses yeux et de son intelligence :
le neveu voyait à la place de l'oncle, et lui disait tout ce qu'il
voyait. L'oeuvre de Jussieu put donc être continuée, et ne fut pas
même interrompue par sa mort.
LE CÈDRE DU JARDIN DES
PLANTES. — Le cèdre est célèbre depuis les temps les
plus reculés par la beauté et l'incorruptibilité de son
bois. C'est en bois de cèdre que Salomon fit construire les lambris du
temple de Jérusalem. Jadis le cèdre couvrait les hautes montagnes
du Liban. Le premier cèdre planté en France fut apporté en
1734 au Jardin des Plantes de Paris par Jussieu.
Ainsi,
dans une famille unie, chaque membre aide les autres et les remplace au besoin
dans leur travail.
Quand on se promène à Paris, au Jardin des
Plantes, on voit un grand arbre, un magnifique cèdre, qui rappelle
Bernard de Jussieu. C'est, en effet, ce dernier qui l'a apporté dans son
chapeau et planté en cet endroit, alors que le grand arbre n'était
encore qu'une petite plante.